Le vent dans les voiles...

[ HJ : Avis aux pirates, je recrute, venez poster ici à ma suite si vous souhaitez faire partie de mon équipage ^__^]

... et une voile dans le coeur.

Accoudé au bastingage de l'Aïcha, Karim tournait le dos au va-et-vient du port et contemplait la mâture magnifique du vaisseau. Il était à quai depuis une semaine, le temps pour Astarloa et ses hommes de se reconstituer une provision d'eau et de vivres dignes de ce nom. Ils revenaient d'une expédition au Brésil contre les Anglais, où leur trésor avait doublé, mais où l'équipage avait diminué de moitié. Karim espérait vaguement que ce mouillage prolongé pourrait lui permettre de recruter de nouveau membres...

Il secoua la tête, et ôta son feutre noir à plume blanche pour s'essuyer le front. Il aimait son vaisseau, il aimait son équipage : ils étaient sa raison de vivre, sa dignité, si tant est qu'un pirate puisse en avoir une. Et cela faisait d'autant plus mal de les perdre...

Alucard commençait à désespérer. Certes, en ce moment, il y avait beaucoup de recrutement mais rien qui ne semblait à peu près convenable. Pirate, oui, mais pas n'importe comment! Alors il avait abandonné les recherches actives, à savoir de prendre des renseignements auprès des capitaines.

Déambulant tranquillement sur le port, Alucard ne passait pas vraiment inaperçu. En effet, à force de devoir être au "garde-à-vous" devant ses supérieurs de la Compagnie des Indes, il avait acqui un port de tête rare dans le milieu des pirates, si ce n'était quelques capitaines. Mais son habillement et son allure n'aidaient pas non plus. Car ses vêtements étaient coupés exactement de la même façon que ceux de la Compagnie des Indes. Mais, heureusements, ils n'en avaient pas la couleur. Le jeune homme aurait bien voulu porter autre chose, mais il n'avait rien d'autre, vu qu'il passait rarement plus de quelques heures à terre.
Ce qui faisait qu'on le remarquait le plus, c'était sans doute le fait qu'il aie l'air si jeune. Sortant à peine de l'adolescence, son visage était encore plus fin que celui des hommes, même s'il avait déjà à peu près la même taille. Ce qui contrastait fortement avec ses cheveux blancs. Il ne savait plus comment il en était arrivé à avoir cette couleur. Peut-être étais-ce dû à une carence quand il était encore petit.

De loin, Alucard aperçut un navire paraissant un peu plus grand que les autres. En s'approchant, il fut directement séduit. C'était sur celui-là qu'il voulait embarquer. S'approchant de la passerelle, il questionna un des hommes qui montait avec un baril d'eau, demandant si le capitaine recrutait. On lui répondit que oui et on lui indiqua un homme visiblement plus âgé que lui, accoudé au bastingage.
Sans aucune hésitation, Alucard monta à bord et se dirigea vers celui qu'on lui avait désigné comme étant le capitaine.

"Il paraît que vous recrutez, est-ce vrai?"

Astarloa de la Saavedra se retourna. Ne venait-on pas de lui poser la question qu'il attendait depuis deux jours ? Un tout jeune homme, au regard sûr et au cou de femme, se tenait près de lui et l'observait avec un mélange d'assurance et de modestie.

"En effet, jeune homme. Seriez-vous intéressé ?"

Il se redressa, quittant l'appui du bastingage, et se campa face au garçon. Il était jeune, un peu fluet, mais bien proportionné, et surtout, il avait l'air fin et audacieux de ceux que la vie a rendu indépendants trop tôt. Il portait un pourpoint propre de coupe militaire classique, que Karim devina sorti des manufactures anglaises de Port Royal, et un sabre d'officier de marine pendait à son côté. Celui là ne venait pas de la flibuste, il en aurait juré.

"J'ai pour habitude de ne jamais poser de questions aux marins qui s'engagent sur l'Aïcha, car leur passé ne regarde qu'eux. Je te demanderais cependant ton nom, même si tu m'en donneras probablement un faux, car ton air m'intrigue. Ton port de tête est celui d'un matelot habitué à la discipline, mot pratiquement inconnu des frères de la côte, et ton accent prouve que tu as fréquenté des anglais."

Il le quitta des yeux un instant, pour lancer un ordre au timonier qui relâchait, et fit un l'air un petit geste de la main, un sourire railleur aux lèvres.

"Tu n'as pas l'air d'un mousse. J'ai besoin d'un second, le poste t'intéresse-t-il ?"

"Me voilà démasqué! A vrai dire, je préfère encore vous donner mon véritable nom. Je n'aime pas les cachotteries et puis, mieux vaut que vous soyez au courant dès le début, je pourrais facilement me trahir tout seul! Je me nomme Alucard Truchot. Mais attention! Je ne suis plus du côté de mon père. Ma mère était une pirate, je veux vivre comme elle. Et puis, j'aime trop la bagarre au goût de mon paternel!"

Dès le début, Alucard avait renoncé à cacher son identité. Et, à vrai dire, il n'y avait même jamais vraiment pensé. La faute à son éducation! A force de grandir dans l'honnêteté, même en étant le fils d'une pirate, on finit par devenir honnête sois-même. D'un autre côté, dans ce cas-ci, cela valait mieux. Imaginez qu'un jour, saoul pour ne pas changer, il se trahisse! Ce serait la curée et on l'accuserait d'être un traître. Non, il refusait cela.

"Du moment que je peux me battre, peu m'importe le poste. Mais si cela peut vous faire plaisir, pourquoi pas?"

Pour éviter de repartir dans un grand discours, Alucard reporta son attention sur l'homme qui lui faisait face. Il était bien plus impressionnant que quand il lui tournait le dos. Mais surtout, il était pas mal du tout. Enfin, mieux valait ne pas s'étendre sur ce côté-là non plus. Il ne l'avouerait jamais, mais il ne voulait surtout pas qu'on lui fasse des avances, étant encore puceau. A son âge, c'était vraiment risible. Mais que voulez-vous! Son père l'avait surprotégé et aucun matelot, mignon ou non, n'avait pu l'approcher à moins d'un mètre. Sauf en cas d'abordage, mais on ne flirte pas avec l'ennemi quand celui-ci menace de vous tuer!

"Pour ce qui est de ma tenue en mer, aucun danger, j'ai grandit sur un bateau. C'est la terre qui tangue!"

Karim sourit à sa manière, c'est à dire sans douceur, mais avec une certaine ironie amicale. Décidémment, celui là était bien étrange. Une honnêteté de jeune fille de bonne famille, et un sourire amoureux à l'évocation de la bagarre et du sang. Il lui plaisait bien, tout fils du vieux capitaine Truchot qu'il soit, et finalement, il ne regrettait pas de lui avoir proposé le second poste du navire.

"Parfait. As-tu déjà appris à manoeuvrer un navire et gérer un équipage ? J'exige de mes seconds qu'ils soient capables de me remplacer en cas de coup dur ou d'attaque sur plusieurs fronts, estimes-tu que cela soit dans tes cordes ?"

Tout en parlant, il l'entraînait vers la dunette, afin de lui montrer le navire dans son ensemble. L'Aïcha était plus fine que les vaisseaux de guerre du temps, et en même temps mieux armée, car ne se contentant pas de canons : Karim avait fait installer dans les hauteurs une espèce de machinerie infernale, un assemblage de canons de mousquets et de mèches, qui permettaient de mitrailler le pont adverse d'une seule décharge, et que les marins appelaient "les orgues du diable". Il y avait en outre plusieurs éperons de bois durci au feu sur l'avant de la coque, un peu en dessous de la ligne de flottaison, et qui permettaient de couler un navire sans même qu'il s'en aperçoive... Et encore bien d'autres armes secrètes, dont Astarloa était le seul à connaître les mystères.

Il désigna le point d'une main au jeune Alucard, visiblement très attentif, puisqu'il ne le regardait pas, pour se concentrer sur le spectacle qui s'offrait à lui. Karim eût un demi-sourire. Il était aussi appétissant qu'un verre de lait coupé avec du rhum.

"Je ne doute pas de votre capacité à vous tenir droit sur le pont, Truchot."

Mordiable, que ce nom était désagréable à prononcer ! Il lui rappelait beaucoup trop la réputation de chien de garde de la Compagnie des Indes du père de son nouveau second. Il haussa les épaules, bien décidé à ne pas s'embarasser.

"Monsieur, votre nom sonne comme un ordre de mise au garde à vous, position que je déteste par dessus tout. Je vous appelerais donc Alucard, dorénavant, et j'espère bien que vous ne me donnerez jamais l'occasion de vous confondre avec votre illustre père. Vous n'en avez pas l'air du reste..."

Il toucha son feutre noir, orné d'une magnifique plume blanche.

"Quant à vous, lorsqu'il vous prendra l'envie de m'apostropher, le capitaine de rigueur sera de mise, mais je vous laisse libre choix du nom que mettrez derrière. Karim, Astarloa, ou Vieux Ronchon, peu m'importe."

Karim sourit intérieurement. Le jeune homme découvrirait bien assez tôt que parmi ses hommes, son surnom officiel était "le fils du Diable".

"J'ai appris. Mais il doit me rester quelques lacunes au niveau de la gérance, je suis partit trop tôt. Mais cela ne devrait pas me poser de problèmes."

Alucard suivait celui qui, semblait-il, serait son capitaine. Tout en restant attentif à ce qu'il lui disait, il leva la tête vers les mâts, apercevant une drôle de machinerie. Serais-ce que que l'on appelle les orgues du diables? Il ne voyait pas assez bien d'où il était, mais ça semblait être cela. L'homme eut un geste de la main qui attira son attention, lui faisait diriger son regard dans la direction désignée. Seulement, dans le même temps, il sentait l'homme l'observer, ce qui le déconcentrait quelque peu. Tournant quelque peu la tête vers l'homme quand celui-ci se remit à parler, il put remarquer a quel point son nom lui semblait être désagréable.

"Vieux ronchon? Pardonnez-moi, mais je ne vois pas pourquoi ce surnom vous est venu à l'esprit. Je ne sais pas quel âge vous avez, mais vous n'avez absolument pas l'air vieux. Ronchon non plus, d'ailleurs. Maintenant, il faudra voir sous la tempête, mais je ne crois pas que vous puissiez être vraiment désagréable."

Lèches-bottes? Non! Sincère, nuance! Par habitude, Alucard avait croisé ses bras dans son dos, position que son père avait absolument tenu à lui inculquer. Plus droit que quand il discutait, la tête haute, tout dans son allure disait qu'il avait été habitué à une discipline de fer ou un seul mot dans les rangs signifiait le fouet pour tous.
Toute son attention dirigée vers le bateau, il ne faisait plus attention au capitaine, mais restait tout de même attentif à ne pas manquer une seule de ses paroles. Distrait de son observation par il ne savait quoi, il se rendit compte de la position qu'il avait prise sans même y penser et se mordit légèrement la lèvre inférieure, décroisant les bras. C'était à cause de ce genre d'attitudes qu'il n'avait pas voulu mentir au capitaine.

"Navré de vous importuner avec de tels détails, mais faut-il que je me trouve une autre tenue? Ce genre de coupe ne doit pas être très appréciée parmi votre équipage, je suppose. D'autant plus qu'avec les attitudes que j'adopte par réflexe, je redoute la curée. Croyez-vous qu'ils seront suffisamment tolérants ou dois-je faire attention?"

Alucard avait tourné son regard bleu turquoise vers le capitaine, à qui il adressa un petit sourire d'excuse.

"Qu'à cela ne tienne, vous apprendrez vite, si vous ne savez déjà."

Karim avait quitté des yeux le jeune homme, qui détaillait le navire sous toutes ses coutures, et sourit. Qu'il l'aimait, son Aïcha, sa naïade, sa demoiselle des mers, baptisée du nom de sa mauresque de mère ! Une danseuse, une guerrière, qui fendait les flots comme d'autres fendaient les salles de bals.

Tandis qu'il faisait un signe de tête négatif au moussaillon, plus bas, qui lui demandait quelque chose par geste, il entendit Alucard protester contre ce nom de Vieux Ronchon qu'il avait lancé à tout hasard, et ne pût s'empêcher d'éclater de rire.

"Certes, maître Alucard, certes ! J'ai 28 ans et je suis plus sabreur que râleur, mais ne vous y fiez pas ! Je jure comme un charretier et je taillade comme un pirate, mes hommes me maudissent tout haut, en m'aimant en silence, il est vrai. Ne vous hâtez point de vous faire une idée sur eux comme sur moi, vous vous ménagerez le plaisir de la découverte."

Il avait prononcé ces derniers mots en souriant presque gentiment, et entraîna de nouveau son second vers les escaliers, pour lui faire visiter le reste du navire. Il avait bien remarqué son attitude raide et digne, ainsi que sa gêne, et, pris de compassion, avait décidé de lui permettre de bouger. Lui aussi, ne savait que trop ce que c'était que la discipline forcée et le regard des autres.

"Ne vous inquiétez pas de votre tenue, et portez celle qui vous conviendra. Les hommes ne sont pas regardant de ce genre de choses, cela leur arrive même fréquemment de se vêtir en officiers français ou phéniciens, par jeu et par défi à l'ordre. Quand à votre tenue... Ma foi, elle les fera sans doute rire, je vous l'avoue. Montrez leur simplement que vous n'êtes pas si bien dressé qu'ils le pensent, et ils vous adopterons comme un des leurs."

Karim hocha la tête, comme pour souligner ses paroles, et ouvrit la porte qui menait à la sainte-barbe et à la réserve d'eau.

"Suivez-moi, je vais vous montrer notre caverne d'Ali-baba. En tant que second, vous pourrez y descendre comme bon vous semblera, cependant je vous recommande d'en laisser le soin à notre cuisinier, Mohamed, il est le seul à ne jamais se cogner aux poutres."

Alucard fut content que le capitaine l'emmène visiter le bateau. Pas qu'il s'ennuie, loin de là! Mais il se trouvait bien trop discipliné que pour pouvoir rester immobile. Ca le gênait vraiment. Mais que voulez-vous! Avant même ses dix ans, il se mettait au garde-à-vous avec le reste de l'équipage! Avec un léger sourire, il le suivit, quelque peu amusé par l'histoire des poutres. Il y en avait donc tant que ça?

"En tout cas, je peux vous dire que c'est un beau bateau que vous avez! Un peu fin, peut-être, mais vous avez là-haut toute une machinerie qui semble compenser."

Par contre, avec un bateau aussi fin, Alucard doutait un peu de sa résistance. Enfin, le capitaine devait connaître son bateau mieux que lui! Seulement, il espérait que cette finesse cachait une quelconque astuce redoutable.

"Quand vous me dites de leur montrer que je ne suis pas dressé, à quoi pensez-vous? J'avoue ne pas avoir très bien suivi et je m'en voudrais de commettre un faux pas d'une façon aussi ridicule."

"Pour fin qu'il soit, le bateau n'en est pas moins solide et résistant. Sa coupe de danseuse et sa légèreté d'hirondelle en font un coureur imbattable, et je défie n'importe quelle corvette de la compagnie des Indes de nous rattraper."

Tout en parlant, il se baissait régulièrement pour éviter les poutres entrecroisées, et indiquait de la main au jeune homme où et quand faire de même. Il avait négligé de prendre une lanterne avant de descendre, et se disait qu'il aurait l'air fin s'il se cognait devant lui, aussi redoublait-il de précautions.

Après trois faux pas et un juron ( son feutre était resté accroché à un clou mal planté ), il arriva enfin près des tonneaux, et put se redresser. Alucard, un peu plus lent dans sa progression, le rejoignit une minute plus tard.

"Mordieu, c'est bien simple : les flibustiers ne jurent que par l'indiscipline et l'irrévérence. Cela et le respect, c'est l'idée que nous nous faisons de la liberté. Si vous montrez aux hommes que vous n'êtes pas un singe savant dressé à faire des courbettes et à se tenir droit en toute circonstance, il ne vous en regardera qu'avec plus de sympathie. Mais tout cela, c'est à vous de la découvrir..."

Il se tourna vers l'assemblages de fûts reliés entre eux par des cordes.

"Les premières rangées contiennent les réserves d'eau potables. Elles sont en cours de reconstitution, j'ai envoyé quatre hommes à terre ce matin. Les bariques du fond contiennent l'huile, le rhum, et le vin. N'y touchez pas seul, car les hommes ne sont pas tendres avec les officiers qui abusent de leurs pouvoirs. Attendez bien plutôt les soirées de beuverie collective, c'est plus convivial et plus amusant."

Alucard suivait très attentivement les mouvements de son capitaine, ne tenant pas à se cogner une seconde fois. S'étant redressé trop tôt, sa tête avait heurté une des poutres, lui arrachant un léger grognement de douleur, alors qu'il marmonnait un "solide, en effet!". Puis, manque de chance, il s'était prit les pieds dans un cordage qui traînait et avait failli tomber sur son capitaine. Heureusement, celui-ci semblait n'avoir rien remarqué.

"Oh, il le verront bien assez vite. Surtout lors des combats."

Levant un instant les yeux au-dessus de sa tête pour vérifier qu'il ne se cognerait plus, Alucard se redressa, tournant un regard distrait vers les barriques, une grande partie de son attention étant retenue par la voix de son capitaine.

"De toute manière, j'ai horreur de boire seul. C'est bon pour les désespérés!"

Le jeune homme se tourna vers son capitaine et voulut faire un pas en avant, mais ce fut là que sa bonne étoile décida de se planquer trèèèès loin de lui. En effet, Alucard se prit une seconde fois les pieds dans un cordage. Sauf que cette fois-ci, il ne put pas reprendre son équilibre à temps. Ce qui fit qu'il se retrouva a moitié dans les bras de son capitaine. Et, bien évidemment, cela le fit virer au rouge pivoine.

"Oh, mais ils l'ont déjà vu, maître Alucard... Et j'espère bien qu'ils le verront encore."

Il observait le jeune homme franchir gauchement les obstacles ( un jour, il faudrait qu'il pense à dire à Mohamed de ranger tout ce bazar ), ne prenant même pas la peine de dissimuler son sourire moqueur. La navire du sieur Truchot père était sans doute beaucoup mieux rangé que le sien.

"On a tous un côté désespéré, Alucard. Un jour, toi aussi tu passeras une soirée dans ta cabine ou sous les étoiles, seul avec ta mélancolie et ta bouteille."

Il avait dit cela d'un ton sceptique et railleur, mais au fond, il ne se sentait pas fier : après l'Aïcha, la dive bouteille était son grand amour, à lui. Que voulez-vous, marins ! On est pas capitaine sans être un peu seul, on est pas pirate sans être un peu philosophe, et on est pas Karim Astarloa sans être un peu alcoolique sur les bords.

Il en était là de ses réflexions, lorsqu'un bruit sourd se fit entendre et le ramena brutalement à la réalité, juste à temps piur tendre les bras et empêcher son second d'aller s'aplatir le nez sur les tonneaux. Le gamin avait trébuché, et faisait une minde si comique, si gênée, que Karim éclata de rire pour la seconde fois en quelques minutes, soutenant toujours le jeune homme, plus joli garçon que jamais.

"Oh oh, maître Alucard, je vous croyais plus d'équilibre que ça ! Que sera-ce quand nous affronterons l'ouragan ou les corsaires, et que vous trébucherez sur les cadavres !"

Horriblement gêné d'être tombé devant son capitaine, et encore plus de s'être retrouvé à moitié dans ses bras, Alucard avait sentit ses joue s'empourprer au point d'avoir la couleur des pivoines. Il aurait pu se redresser, s'excuser et faire comme si de rien était, mais il fallut que son capitaine se moque de lui.
Furieux, il se redressa et d'un geste aussi rapide qu'imprévu, flanqua une gifle du revers de la main à son capitaine.

"On n'a jamais vu pareil bordel non plus! Et sachez que dans la tempête ou au milieu des cadavres, au moins, on y voit a trois pieds devant soi! On n'a pas idée de laisser traîner des cordages au milieu des barriques!"

Alucard était au moins aussi rouge de gêne que de colère. C'était une des raisons pour laquelle il s'était beaucoup disputé avec son père. Il s'énervait facilement et frôlait parfois l'insubordination. D'ailleurs, une fois où il avait un peu bu, il avait passé à tabac un des plus hauts gradés de la Compagnie des Indes.
Parce que le jeune homme avait beau être parfaitement obéissant, il ne fallait surtout pas l'énerver.

Alors ça ! Il n'avait pas plutôt fini fini sa phrase que le gamin s'était redressé et l'avait souffleté violemment. Nom d'un requin sodomite ! Ce petit freluquet allait voir ce qu'il allait voir. Après avoir ricanné aussi franchement qu'ironiquement, Karim s'était redressé de toute sa taille, et avait toisé le jeune homme, les poings sur les hanches.

"Eh bien puisque ce bordel vous insupporte -au reste, vous êtes bien le premier à vous en plaindre-, vous allez me ranger et me nettoyer ça sur l'heure, maître Alucard ! A vous de trouver une place pour chaque chose et pour votre joli petit cul ! Je vous donne une heure, et quand vous aurez fini, vous me rejoindrez sur le pont, que je vous présente à l'équipage. Après tout, vous êtes leur supérieur, désormais."

Karim passa une langue sournoise sur ses lèvres. Il était plus amusé que furieux, et pour sûr, le garçon lui plaisait ! Mais il ne se laisserait pas gifler chaque fois fois que lui prendrait l'envie de se moquer de lui, ça non !

"Votre susceptibilité dénote une fierté certaine et une audace plaisante, mais ne vous avisez jamais de recommencer, ou je vous traîne cul nu sur le pont et je vous donne la fessée devant tous les matelots réunis."

Il désigna l'endroit à nettoyer à Alucard, et se dirigea vers l'escalier pour remonter sur le pont. La sanction, si elle restait connue de lui seul, serait bénéfique : Alucard retiendrait la leçon, et les hommes le respecteraient.

Il profita d'avoir le dos tourné pour se frotter doucement la joue. Il n'avait pas été giflé depuis bien longtemps, et il se rappelait à présent combien cette petit violence pouvait l'exciter...

En apprenant qu'il allait devoir tout ranger et nettoyer, Alucard avait dut serrer dents et poings pour ne pas gifler à nouveau le capitaine, quoique du plat de la main, ce qui faisait bien plus mal. Ou alors, ça aurait été un coup de poing, il ne savait pas trop. Et puis, a vrai dire, il s'en fichait royalement. Sur le coup, il avait une sacrée envie d'insubordination.

Se penchant, Alucard ramassa déjà la corde dans laquelle il s'était prit les pieds et passa ses mains dessus pour savoir si elle était encore utilisable ou non. Visiblement, oui. Alors, il l'enroula autour de son bras pour en faire un rouleau qu'il déposa à tâtons sur un étagère. Mais quand son capitaine se retourna pour s'en aller, il vit à nouveau rouge.

"Hep, fillette! J'fais comment si j'y vois rien??!!"

Alucard avait presque hurlé sa phrase et, avec un peu de chance, on l'aurait entendu jusque sur le pont. Ce serait bien fait pour le capitaine. Et avec encore un tout petit peu de chance, il se mangerait une poutre et là, il pourrait prendre sa revanche. A son tour de se moquer de lui, non mais! Il imaginait déjà ce qu'il dirait. Il avait rarement désiré une vengeance mais, cette fois-ci, il espérait de tout coeur trouver une occasion.
Qu'on le rabaisse, à la limite... Mais qu'on l'humilie! Ca n'allait pas se passer comme ça! Comme si le simple fait de s'être cassé la figure ne suffisait pas!

Fillette ! ... Fillette ??!!

Karim se retourna violemment... trop violemment sans doute, puisqu'avant même d'avoir terminé son mouvement, son nez rencontra sans douceur la poutre de derrière. Sa colère devint fureur.

"Par les couilles d'Henri IV ! Cria-t-il, en marchant droit à Alucard. Tripes du Pape et Ventre de ma mère, sais-tu bien ce que tu viens de dire là, gamin ?"

Il empoigna le jeune homme par le col, et le secoua comme un prunier.

"Tu peux me gifler, me mettre la main au cul, pisser dans mon rhum et me voler mes culottes, je m'en ficherais encore, mais insulter ma virilité, ça jamais !"

Il le tenait toujours en l'air, ses yeux noirs fixés sur les siens. Il s'agaça de sa tranquilité, en même temps qu'il se réjouissait de son absence de peur, et résolut de lui prouver que s'il voulait naviguer avec lui en bonne intelligence, il ne devait pas le sous-estimer.

"Je suis ton capitaine et tu m'as manqué de respect de la plus vile manière qui soit, aussi vais-je te punir. Seulement je suis gentilhomme, moi, et partisan de l'éducation."

A peine eu-t-il prononcé ses mots que, tenant toujours Alucard par le col, il l'attira à lui et l'embrassa sans douceur, avec plus de violence que de passion. Le baiser dura moins d'une minute, car il ne voulait pas y prendre goût. Lorsqu'il le relâcha, il le regarda bien droit dans les yeux.

"Fillette, hein ?"

"Quelle... Hmm!!"

Alucard avait voulut demander de quelle éducation son capitaine voulait parler, mais il n'en avait pas eut l'occasion, trop surpris d'avoir été attiré contre l'homme et d'avoir été embrassé. Ses yeux turquoise s'étaient écarquillés, alors qu'il se crispait brusquement. Certes, il avait honte de le reconnaître, mais c'était son premier baiser. A vingt ans! Quelle pitié... Il aimait les hommes, oui! Mais il aurait voulu que ça se passe autrement. Heureusement, cela ne dura pas, et il fut reposé au sol. Baissant la tête, les joues toujours aussi rouges, il croisa ses bras dans le dos, comme son père le lui avait appris quand il se faisait réprimander.

"Veuillez pardonner mon insolence, capitaine... Pourrais-je avoir une lampe afin d'y voir quelque chose? Je ne voudrais pas casser quelque chose par mégarde..."

Sa voix était un peu rauque, sans doute à cause du baiser. Et aussi parce qu'Alucard avait honte de son comportement. Une fois la colère passée, c'était toujours comme ça, il s'en voulait et reprenant une conduite irréprochable. Trop gêné, il gardait le regard fixé au sol et n'osait pas redresser la tête, également parce qu'il avait été habitué à devoir attendre un coup de fouet pour le punir de son insolence.

"Je suis à vos ordres, capitaine..."

Décidémment, celui là se laissait vite matter... Karim haussa un sourcil, peu convaincu par ce revirement de comportement aussi soudain que complet. Alucard avait baissé le nez, tout en se mettant au garde à vous, bras croisés dans le dos, dans cette position si guindée et si sage que le capitaine lui avait déjà vu une fois.

Il avait l'air sincère, pourtant.

"Vous trouverez un falot éteint accroché à la plus grosse poutre, tournez la clé pour l'allumer." Grogna-t-il, en considérant son second d'un air perplexe. Soit celui là comprenait vite, soit il était complètement schizophrène !

Il fit un pas en arrière, et écouta la déclaration d'obéissance sans broncher, un peu radouci. Alucard avait des airs de chaton pris en faute, et ses joues roses d'adolescent n'arrangeaient rien.

"Je l'espère bien, Alucard." Dit-il d'une voix calme, mais ferme. "Vous allez finir de ranger ces cordages, comme je vous l'ai dit, et ensuite nous irons vous présenter à l'équipage. Seulement je reste avec vous, cette fois."

Et, joignant le geste à la parole, il alla s'asseoir sur un des tonneaux, pour observer l'ancien officier de la Compagnie des Indes faire le ménage dans sa cale comme un vulgaire mousse. Il n'était pas cruel, il tenait simplement à lui faire comprendre qu'il n'était pas du genre débonnaire. Et puis, il devait bien se l'avouer, le baiser lui avait plus, comme à chaque fois... Et il regrettait un peu de s'être montré aussi brutal, même s'il l'avait été à dessein, et que cela semblait avoir porté ses fruits.

Alucard sentit son ventre se nouer brusquement quand son capitaine lui dit qu'il resterait avec lui. Non, non, non et non! Il ne voulait pas! Pourtant, il acquiesça, se mordant la lèvre inférieure.

"Bien, capitaine..."

Le jeune homme alla alors allumer la lumière, avant d'aller s'asseoir au sol, ramassant les cordages pour les enrouler correctement. Volontairement, il tournait le dos à Karim, passant de temps à autre son bras sur ses yeux. Son capitaine ne pouvait pas le voir, mais il était bel et bien entrain de pleurer. Son premier baiser! Il n'arrivait pas à y croire. Il ne voulait pas y croire non plus. Et pourtant!

Après en avoir finit avec les cordes, il se releva et trouva un balais dans un coin. Alors il commença à balayer, prenant toujours soin de tourner le dos à son capitaine. Il ne fallait pas qu'il le voie pleurer, surtout pas. Sinon, il pourrait se moquer de lui de nouveau. Mais cette fois-ci, il ne pourrait pas le frapper, juste baisser la tête, rougir, et balbutier honteusement qu'à vingt ans, il lui avait prit son premier baiser. Toujours de sa voix trop rauque, il reprit la parole, tournant toujours le dos à l'homme.

"Faut-il que je mette également de l'ordre autre part, capitaine?"

Karim, toujours perché sur son tonneau, avait croisé les jambes à la manière des turcs, et observait Alucard se démener pour ranger la cale, le menton appuyé dans ses mains. Oui, celui là était défintivement radouci et matté, lui qui hurlait encore de fureur une minute auparavant.
Karim, un peu bourrin, mais toujours attentif aux autres, se doutait bien qu'il avait autre chose que de la simple soumission là dessous. Le jeune Truchot était-il fou ? Ou bien avait-il été à ce point traumatisé par son père que toute vélléité de révolte s'éteignait immédiatement ?

Il fronça le sourcil lorsqu'il s'aperçut qu'Alucard gardait toujours les yeux baissés, et s'obstinait à lui tourner les dos, les épaules -très !- légèrement tremblantes. Nous l'avons dit, Karim était un peu bourrin, mais au fond, il avait bon coeur. Il se leva et s'approcha doucement, pour poser une main sur l'épaule du jeune homme.

"Non, ça ira... Mais red..."

Il s'interrompit. Il avait penché la tête pour mieux parler, et avait entraperçu une traîné brillante sur la joue d'Alucard. Il pleurait. Karim déglutit, affreusement gêné. Oui, décidémment, celui là était complètement schizophrène ! Ou alors il avait encore plus besoin d'aide que ce qu'il pensait...

Ne sachant trop que faire, Karim décida de laisser sa dignité au garçon, et de faire semblant de n'avoir rien remarqué. Très vite, il reprit sa phrase :

"... Mais ne recommence pas. Allez, je sors, pose ce balai, le sabre te va bien mieux dans la main, et rejoins moi en haut."

Malgré lui, sa voix s'était radoucie. Il lui donna une tape amicale sur l'épaule, et se dirigea vraiment la porte, cette fois.

Alucard avait gardé la tête baissée, sa gorge se nouant au contact de la main du capitaine sur son épaule. Zut! Il allait le voir pleurer et allait encore se moquer de lui parce qu'un homme n'est pas censé pleurer. La phrase commencée par son supérieur s'interrompit brusquement, prouvant qu'il l'avait bel et bien vu pleurer.
Heureusement, Karim ne dit rien, à sa grande surprise, et reprit sa phrase là où il l'avait laissée. Un peu surpris par sa voix radoucie et la tape amicale à laquelle il avait eut droit, Alucard hocha légèrement la tête.

Une fois le capitaine sortit, il s'essuya les joues et alla déposer le balais là où il l'avait trouvé. Prenant quelques instants pour se calmer, il sortit un poudrier de l'intérieur de sa veste. Certes, les hommes ne devraient pas se maquiller mais un peu de poudre était idéal pour cacher ses joues rougies par les larmes. Après avoir prit une grande inspiration, il reprit son air habituel, à savoir celui avec lequel on pouvait directement voir qu'il venait de la Compagnie des Indes.
Le dos bien droit, fier comme s'il ne s'était rien passé, il regagna le pont, cherchant le capitaine du regard. Où s'était-il planqué, celui-là? Enfin, cela valait peut-être mieux qu'il le voie le moins possible. Il l'aurait bien cherché, mais il n'osait pas trop bouger de là où il était.

Une fois sur le pont, Karim était allé se placer au niveau du grand mât, et attendit que la porte de la cale s'ouvre et qu'Aluard vienne le rejoindre. Il comptait signaler sa présence et ses nouvelles fonctions de second à l'équipage, afin qu'ils apprennent à reconnaître le visage de leur nouveau supérieur, et à le considérer comme tel. Il espérait juste que le gamin aurait eu le temps de se remettre, et de se composer un visage de circonstance...

Ses craintes se dissipèrent quand il le vit paraître, calmé, sérieux et droit, et qu'il s'avança vers lui. Karim hocha la tête pour lui même, et claqua trois fois dans ses mains pour attirer l'attention de tous.

"Matelots, amis, vous savez que beaucoup de nos frères sont morts pendant le dernier affrontement, et que si peiné que j'en sois, je me dois de les remplacer pour la bonne marche de la communauté. Je vous présente donc Monsieur Alucard Truchot, qui sera désormais mon second, et votre supérieur. Traitez le comme un des vôtres."

Il regardait chacun de ses hommes en disant cela, depuis le timonier jusqu'à la vigie, tout là haut, et attendait leur réaction, sans regarder Alucard, pour ne pas le troubler en lui rappelant ce qui s'était passé dans la cale.

Au nom de Truchot, il y eu quelques murmures, des sifflets, et une voix s'éleva pour protester :

"C'est un espion de la Compagnie des Indes ! On ne veut pas de ça comme vice-capitaine !"

Karim fronça les sourcil, et se tourna vers l'homme qui venait de parler ainsi.

"Si vous soupçonnez Alucard, vous pouvez bien soupçonner tout le monde, car vous êtes tous des fils de putes et de salauds, comme moi et comme lui. Personne n'est innocent, ici."

Il fit un signe de tête à Alucard.

"Au reste, demandez lui à lui même, et vous verrez ce qu'il vous répondra, tas de thomassiens !"

Il promena de nouveau son regard flamboyants sur ses hommes, et s'arrêtra sur Alucard. Maintenant, c'était à lui de faire ses preuves.

Quand un des hommes était ouvertement intervenu, il avait dardé sur lui un regard froid et méprisant. Lui? Un espion? Tss... Comment un homme pouvait-il être si bête? Tournant légèrement la tête vers son capitaine, Alucard le laissa intervenir en premier, avant qu'il ne lui donne indirectement la parole. Alors, toujours aussi droit et fier, il s'avança vers celui qui avait osé le traiter d'espion.

"Réfléchissez un peu. Si j'étais un espion, croyez-vous que j'aurais donné mon véritable nom? De plus, j'aurais fait en sorte qu'on ne me reconnaisse pas. Ce qui, vous pouvez vous-même le constater, n'a absolument pas été fait. Promenez-vous une fois là où sont affichés les avis de recherche. Ma tête est mise à prix pour trahison. On ne lance pas d'avis pour les espions."

Là, s'il trouvait quelque chose de valable à répliquer, Alucard voulait bien aller se rendre. D'autant plus qu'il gardait les bras croisés dans le dos et le fixait de son regard de glace, aussi impassible que possible.

Karim hocha de nouveau la tête au discours d'Alucard, qui s'était défendu avec honnêteté et assurance. Peut être un peu de froideur, aussi... juste ce qu'il fallait pour montrer à cette bande de grands enfants qui commandait.

Les hommes approuvèrent, haussant les épaules et considérant le nouveau second avec une distance intéressée, dûe à la nouveauté du visage, et retournèrent vaquer à leurs occupations. Celui qui avait traité le petit Truchot d'espion avait grogné pour la forme, mais Karim lui avait lancé un regard de travers, et il avait filé droit.

Astarloa se tourna de nouveau vers Alucard.

"Vous leur avez montré que vous aviez du caractère. Reste à leur prouver que vous avez du coeur et du courage, et il vous suivront. Venez, je vais vous montrer le reste du navire."

Dans ses yeux, la même ironie amicale qu'avant, avec juste une lueur de sympathie en plus. Alucard lui avait déjà prouvé, à lui, qu'il avait du coeur...

"Comment pourrais-je le leur montrer? Mon père ne m'a pas appris ça, à moi."

Depuis qu'il était de nouveau seul avec le capitaine, le visage d'Alucard s'était quelque peu radouci. Non, il était incapable de se montrer volontairement ainsi devant l'équipage. Avant qu'il ne s'en aille, il n'avait jamais vu personne esquisser le moindre sourire sur un bateau. Ou tout du moins, pas avant d'être complètement saoul.

Distraitement, il le suivait, moins attentif que la première fois. Il fallait dire qu'il était encore troublé parce qu'il s'était passé à peine quelques minutes plus tôt. Pourquoi n'avait-il rien dit quand il l'avait vu pleurer? Il n'arrivait pas à comprendre.

"Tout à l'heure, vous auriez pu vous moquer de moi. Je n'aurais même pas su répliquer."

Une très légère rougeur s'installant sur ses pommettes, Alucard évitait de regarder son capitaine, quelque peu gêné.

Karim se retourna, sourcil haussé et demi-sourire aux lèvres.

"Ma foi, vous l'apprendrez par vous même alors, maître Alucard. Vous verrez, ce n'est pas si difficile que ça."

Il entraîna le jeune homme du côté des cabines, afin de lui montrer les cartes et les instruments de navigation, afin qu'il sache où les trouver si besoin. Il se retourna de nouveau à la question d'Alucard, en haussant les deux sourcils cette fois, et sans sourire, car trop interloqué.

"Je suis peut être un pirate, Alucard, odieux à mes heures, mais je ne suis pas un monstre. Jamais tu ne me verras rire d'une douleur réelle."

Il avait dit cela posémment, sincèrement. Et, comme pour contrebalancer cette réplique sentimentale, il sourit de nouveau, et sussura :

"Et puis, tant qu'à rire, autant rire à la loyale. Tu l'as dis toi-même, tu n'aurais pas su répliquer, cela n'aurait pas été juste de te provoquer en duel verbal."

Avec Alucard, il passait du vouvoiement au tutoiement par jeu, sans formalité. Peut être parce que le jeune homme se comportait à la fois en adulte et en enfant...

(coupe de sujet pour que votre petite sauterie entre mecs virils et avides de soulager leur désir soit à part Je mets le lien dès que c'est fait)